Inde : l’aromathérapie dans les bidonvilles de Bombay

Les bidonvilles de Bombay, c’est bien le projet le plus original, le plus insolite et le plus éprouvant auquel j’ai participé durant mon séjour en Inde. Je me suis rendue dans cette ville pour rencontrer Marie Berthelot, une jeune aromathérapeute française qui soigne dans les bidonvilles à l’aide des huiles essentielles. Il y a un peu plus de deux mois, elle a rejoint une ONG belge établie sur place : les Acupuncteurs aux Pieds Nus. Il y a un environ deux ans, Walter Fischer, l’initiateur du projet, a ouvert un petit dispensaire en bordure des bidonvilles où, pour l’équivalent de 0,30 cents, les populations pauvres pouvaient être soignées grâce à l’acupuncture. Pour répondre à une demande grandissante, il a déménagé dans une clinique plus grande l’été dernier. Cela lui permet de recevoir davantage de patients mais également d’agrandir son équipe. Son objectif est de former des locaux à cette pratique et d’ouvrir d’autres cliniques dans les bidonvilles plus pauvres. Pour ce faire, il recherche des acupuncteurs intéressés de venir partager leur expérience et de former des Indiens tout en découvrant l’acupuncture humanitaire. Walter prône une logique d’échange de pratiques et de savoirs. C’est dans cette optique que Marie est venue rejoindre l’équipe afin d’apporter son expertise sur les huiles essentielles et créer des ponts entre l’acupuncture et l’aromathérapie. Ces deux pratiques sont complémentaires car l’une permet de soigner où l’autre atteint ses limites. En plus des aiguilles disposées sur le corps des patients, Marie les traite à l’aide des huiles essentielles. Massage, réflexologie plantaire, olfactothérapie, voie orale, application cutanée, tout y passe. En complément de son travail au dispensaire, elle œuvre à faire connaitre l’aromathérapie.

Inde – Ooty : huiles essentielles d’eucalyptus

Après mon séjour dans le Kerala, à la découverte de la médecine ayurvédique, je suis partie pour les Nilgiris, au sud de Bangalore. Cette région est située à près de 2500 mètres d’altitude. Elle est réputée pour ses plantations de thé, son agriculture et son climat clément. Je suis venue à Ooty parce que c’est la région des producteurs et des distillateurs d’huiles essentielles. Des forêts d’eucalyptus à perte de vue et des magasins en tout genre vendant principalement de l’huile essentielle d’eucalyptus. L’eucalyptus globulus est l’huile qui est majoritairement distillée dans les Nilgiris. Mais on trouve aussi beaucoup d’eucalyptus citriodora, de citronnelle ainsi que du lemongrass. Les producteurs cultivent également du basilic, du romarin et du thym qui sont destinés à la production d’huiles essentielles. Une huile qu’on trouve aussi beaucoup dans cette région, c’est la gaulthérie couchée. Très vite, je me suis rendue compte que cette gaulthérie n’avait rien de naturel. Elle est rose grenat et ne sens pas la vraie gaulthérie. Il m’a été confirmé par la suite que cette plante ne pousse pas dans les Nilgiris et qu’il s’agit d’une gaulthérie synthétique, préparée en laboratoire. C’était juste très étrange pour moi qu’elle soit vendue au même titre que les autres huiles essentielles naturelles.

Cette constatation est intéressante car elle nous parle de la manière dont les Indiens appréhendent les huiles essentielles. J’ai appris que seulement 20% des huiles essentielles produites à Ooty sont utilisées localement. 80% de la production est vendue à l’étranger ou utilisée par les laboratoires pharmaceutiques, le secteur cosmétique et la parfumerie. Dans les 20% locaux, très peu sont utilisés par les habitants des Nilgiris. Ces derniers emploient principalement l’eucalyptus pour soigner les maux de gorge et les rhumes ainsi que la gaulthérie pour les douleurs musculaires et articulaires. La plupart des huiles qu’on trouve dans les magasins d’Ooty sont achetées par les touristes (la plupart indiens car les Nilgiris sont une destination très prisée des Indiens en quête de fraicheur). Lors de leur séjour, ils achètent de l’huile essentielle d’eucalyptus qu’ils garderont, pour la plupart, pendant des années. Depuis mon arrivée en Inde, j’avais le sentiment que les Indiens connaissent peu et donc utilisent peu les huiles essentielles. Mon passage dans les Nilgiris et les échanges que j’ai pu avoir avec les locaux ont confirmé ce sentiment. L’Inde est bien un pays producteur d’huiles essentielles mais pas un pays utilisateur (ou en tout cas, en petite proportion).Néanmoins, l’aromathérapie commence à émerger en Inde : des massages aux huiles essentielles sont proposés, certains magasins en vendent comme par exemple celui de l’ashram de Pondicherry. De plus, les huiles essentielles sont utilisées dans les préparations ayurvédiques. Elles font partie des ingrédients entrant dans la composition des huiles médicinales.

Inde – Kerala : la médecine ayurvédique

Après Pondicherry, je suis partie dans le Kerala. En regardant la carte, quelle ne fut pas ma surprise de constater que le berceau de la médecine ayurvédique était en fait un tout petit état de l’extrême sud de l’Inde. Une fois sur place, j’ai appris que le Kerala jouissait d’un taux d’alphabétisation bien supérieur au reste du pays. Les Keralais sont réputés pour avoir un haut niveau d’éducation et pour être soucieux de leur santé et leur bien-être. Cela s’explique, sans doute, par la tradition ayurvédique et le fait que la prévention tient une place prépondérante dans cette médecine.

Ayur veut dire Vie ! Véda veut dire Science ! C’est une véritable philosophie, connaissance de la vie. Les textes les plus anciens ont près de 5000 ans. Ils traitent d’alimentation, d’environnement, d’écologie et de tout ce qui a attrait à la vie. En Occident, nous connaissons principalement le yoga (qui est une toute petite partie de l’Ayurveda) et les massages qui sont une branche de la partie curative. Mais l’Ayurveda, c’est beaucoup plus que cela. Elle préconise une série d’habitudes à appliquer dans son quotidien : faire de l’exercice, travailler sa respiration, manger sainement, prendre des traitements préventifs, … C’est une véritable médecine qui est enseignée dans les universités. Le cursus de base dure cinq ans et il est suivi d’une spécialisation de trois ans. C’est avant tout une médecine préventive, l’objectif est de se maintenir en bonne santé. Elle préconise une approche holistique de l’être humain. L’individu est actif dans son processus de guérison ou dans le maintien de sa santé dans le cadre de la prévention.